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À priori, je ne suis pas une fan de l’hiver. Je suis génétiquement conçue pour le sud et les palmiers, j’ai le sang chaud et l’esprit latin, le soleil est imbriqué dans mon ADN. La Sibérie ne fait pas partie de mes fantasmes de voyages; Hawaï, oui. Je pourrais, sans aucune difficulté, faire un ours de moi-même et m’installer dans une tanière de novembre à mai. (Je grossis un peu le trait, mais vous voyez le genre. Et je sais, je suis loin d’être la seule dans cette situation).

En fait, depuis toujours j’entretiens un rapport haineux avec l’hiver. Je me sens littéralement… victimisée par lui.

Mais depuis l’an passé, j’ai décidé de changer la donne. Dans l’optique de reprendre la responsabilité de ma vie et de ne plus laisser les affres de la météo avoir de l’influence sur moi, j’ai pris l’hiver à bras-le-corps. Un combat sans merci — même si je prévois, dans un avenir pas si lointain, ne plus passer mes hivers au Québec.

Ma première stratégie? M’acheter… des vêtements chauds. Ça semble idiot, mais j’étais tellement dans le déni de l’hiver qu’inconsciemment, une partie de moi croyait que, sans des vêtements appropriés à la saison, je pourrais finir par croire que l’hiver n’existait pas. « Investir » sur l’hiver me semblait une hérésie, c’était comme si je lui donnais du pouvoir et confirmais son existence. (Par contre, acheter une paire de sandales pour l’été m’a toujours paru essentiel.) J’ai passé la plupart des mes hivers avec des bottes et manteaux (recyclés) complètement merdiques, hideux à porter. Ce qui, je m’en aperçois maintenant, a viscéralement cultivé ma haine pour cette saison — qui ne m’en veut pas personnellement, bien sûr…

(Parenthèse… Lorsque tu portes depuis 1993 le même manteau, préalablement usé par deux personnes avant toi, ça a beau être un Kanuk… Lorsque tu le jettes, après plus de trente ans de loyaux services, t’en fais presque un feu de joie. Et t’as hâte que les vidanges passent, pour être sûre et certaine de ne JAMAIS le revoir. Fin de la parenthèse).

Bref, en mars passé, le jour où, après avoir loadé ma carte de crédit pour acheter à 50 % bottes et manteau full duvet, c’est comme si soudain l’enfer devenait un peu plus supportable. Puis, en novembre, quand j’ai vu l’hiver arriver et que je me suis rappelé mon manteau neu’ que j’avais à peine porté (fin de saison oblige), j’avais presque hâte qu’il fasse moins trente pour le tester. Et comme de fait, il tient ses promesses sans me donner l’allure d’un robot des années 80. (Et non, ce n’est pas un Canada Goose.)

Cela dit, depuis janvier, j’ai monté d’un cran mon bras de fer avec l’hiver.

Circonstances obligent, je dois désormais pelleter, ce qui m’était auparavant épargné. Pour ce faire, tchik-tchik, j’ai encore investi, dans un manteau léger, qui respire et me laisse libre de mes mouvements. Courageusement et avec style, sans perdre des litres de sueur, j’affronte l’horrible tâche avec ma pelle cheap et je tente d’en faire une méditation active. Chose certaine, je me fais des bras d’enfer. Et je prends l’air. Voyez, même mon minding a changé. Une vraie machine.

Puis, me prenant moi-même par surprise, et ce, des lustres après avoir fait mienne la citation de Winston Churchill lorsqu’on le questionnait sur le secret de sa proverbiale longévité : « Le sport, JAMAIS le sport », j’ai décidé, après 25 ans, de rechausser les patins. Oui, malgré ma haine viscérale ET de l’hiver, ET du sport. Vous comprendrez que j’ai pogné l’hiver dans le détour; il ne s’attendait pas à ça, mais alors pas du tout. « Coup bas », il m’a répondu. Pour ensuite faire monter les hostilités : des moins 25, 28, 30 degrés à n’en plus finir. Ouin? J’ai répondu par la voix de mes caleçons en laine de mérinos : « on y va pareil, patiner, s’tu clair? ».

(Très franchement, mon ti-manteau rouge et moi, on en redemande. Et comme le manteau en question a été expressément conçu pour le ski alpin, on a de nouveaux plans pour faire un pied de nez à l’hiver… après tout, il n’est jamais trop tard pour avoir son baptême sur les pentes, n’est-ce pas?)

Insatiable, j’ai alors sorti la stratégie ultime. En fait, pour les raisons susmentionnées (haine du sport ET de l’hiver) je me pince encore pour croire à ce qui est arrivé ensuite : JE ME SUIS MISE AU JOGGING. (Oui, je cours dehors). Quelqu’un m’aurait dit ça, il y a à peine quelques semaines, et j’aurais hurlé « quelle horreur! » en accentuant les R centraux; ou alors, je me serais exclamée avec  emphase : « de grâce, rentrez-moi à l’asile ». Il m’est difficile d’expliquer en quelques mots les raisons de cette volte-face de ma part (j’en reparlerai sans aucun doute sur mon blogue), mais cela me semble être le résultat d’un processus naturel… la drogue (dopamine-adrénaline-sérotonine) faisant le reste.

En résumé, d’ici la fin mars, si tout va bien, on devrait, l’hiver et moi, avoir enterré la hache de guerre. Je vais être sincèrement à boutte, mais je serai un peu plus indulgente que d’habitude. J’aurai, pour une fois, passé de bons moments en sa compagnie, et le plus important, je n’aurai pas l’impression de l’avoir subi. Je l’aurai choisi.

Là où l’été n’est pour moi qu’un enchantement perpétuel, entre douceur de vivre et légèreté, l’hiver revêt à mes yeux une personnalité bipolaire qui oscille entre enfer et féérie. Enfer de ses intempéries et froids polaires; féérie de ses paysages mirifiques qu’il nous offre parfois, lorsqu’il tombe des peaux de lièvres, que la neige brille comme diamant, ou alors qu’une fine pellicule de neige recouvre élégamment les branches des arbres, leur donnant presque un aspect satiné.

On remarquera que c’est la poésie qui m’a donné le goût de parler de l’hiver. Pas le froid et le pelletage, ni le verglas ni le grésil, encore moins le calcium et la slush. Qu’on se le dise.

Hawaï? N’importe quand. Mes sandales et moi on est toujours prêtes à partir.

Mieux, mes espadrilles et moi, on a un plan… une course de 10 km au prochain marathon de Maui, en janvier 2016… À suivre.